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Bouge It
26 mai 2016

Fillon

Bien sûr, dans la primaire à droite, François Fillon est loin derrière. Il le sait. D’ailleurs, les éditorialistes et les instituts de sondage ne prennent même plus la peine d’évoquer son cas. On s’en tient au duel Juppé-Sarko. C’est une erreur. Car pour la première fois depuis longtemps, Fillon étonne par sa détermination : « J’irai au bout de cette primaire », répète-t-il à l’envi. Celui qui avait déclaré, en entrant à Matignon, « si la France était une entreprise ou un ménage, elle serait en cessation de paiement » prône désormais des mesures de redressement radicales. En pays gaulliste, les pistes retenues par Fillon sentent le soufre et la transgression. Lui qui s’est toujours défié des enquêtes d’opinion veut croire que son programme, à rebours du réformisme prudent d’Alain Juppé et nettement plus libéral que le socle défendu par Sarkozy, pèsera dans les débats de la primaire, prévue les 20 et 27 novembre 2016. Sa place d’outsider semble lui donner des ailes. À l’inverse de ses deux principaux concurrents, Fillon a bouclé sa plate-forme programmatique. « Il se prend pour Thatcher », commentait un brin effaré un sénateur de droite. Pourtant, dans les couloirs de l’Assemblée, députés républicains et socialistes louent le travail accompli par l’ancien premier ministre de Sarkozy : « Il a bossé lui au moins… » Une ligne ambitieuse, un projet clair, en rupture avec tout ce qui a été fait par la droite et la gauche jusqu’à présent : retour aux 39 heures, à l’équilibre des comptes sociaux, suppression de l’aide médicale de l’État, réduction des dépenses publiques de 110 milliards sur cinq ans, relèvement des seuils sociaux, fusion des départements et des régions, stricte égalité des régimes de retraite, mise en place de l’immigration par quotas, diminution du nombre des parlementaires, contrat de travail unique, revalorisation du salaire des enseignants “au mérite” (quand Alain Juppé, lui aussi engagé dans la course à la présidentielle, veut augmenter “automatiquement” de 10 % le salaire des professeurs du primaire). François Fillon veut aussi supprimer les vacances des parlementaires, qui « siégeront l’été en session extraordinaire pour adopter les grandes réformes et en particulier les principales lois pour réanimer l’économie ». Dans son manifeste, intitulé “Osons dire, osons faire”, Fillon feuilletonne ses deux premières années à l’Élysée. Il se fait théoricien de l’« accélération » : « Les ministres, dont la liste sera connue à l’avance, mettront en oeuvre une dizaine de réformes pour provoquer un choc de confiance. » Tapi au coeur du peloton, François Fillon observe, goguenard, la tête de la course. Il attend son heure avec l’assurance du premier de la classe qui sait que sa copie est meilleure que celle des autres.

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