Renaissance en plein ciel

Avant-hier, j'ai comblé un vieux rêve : j'ai réalisé un vol en avion de chasse ! Ca s'est passé à l'aérodrome de Pontoise. Je me suis présenté au matin, un peu fatigué. Non que j'aie fait la fête la veille (rien de tel qu'un estomac en vrac pour repeindre l'intérieur d'un cockpit, surtout si des acrobaties sont prévues), mais j'avais, ô surprise, mal dormi à l'idée de cette journée. Je n'avais pas eu cette impression depuis que, tout gosse, j'attendais le lendemain pour partie en colonie de vacances ! :) Une fois sur place, et après une séance briefing (où l'on m'a présenté l'appareil et les consignes de sécurité), j'ai enfin enfilé ma combinaison de vol et me suis rendu sur le taxiway. N'eût été mon sourire crispé, on aurait pu me croire sorti de Top Gun ! Sur le taxiway, le Fouga Magister m'attendait. L'appareil mythique qui a servi à la Patrouille de France pendant plus de vingt ans (avant qu'il soit détrôné par l'Alpha Jet). Le ventre noué, je me suis hissé à bord de l'appareil et harnaché au siège. Quelques minutes plus tard, on était finalement parti. Vers l'infini et au delà ! Les premières minutes m'ont d'emblée rassuré par leur côté tranquille. Mais je crois qu'elles ne servent qu'à ça, en fait : à vous endormir pour mieux vous surprendre ensuite. On a donc commencé par un vol d'initiation, idéal pour prendre quelques photos souvenirs. Des instants Kodak à la pêle, en veux-tu en voilà. On a poursuivi avec un vol à basse altitude, ce qui m'a permis de profiter un peu mieux de la sensation de vitesse. Puis le pilote m'a demandé si j'étais prêt pour la phase de voltige. J'ai répondu oui. Je m'étais préparé pendant des semaines ; j'avais lu des dizaines d'articles sur le sujet ; je connaissais absolument tout de la théorei. Mais quand ça a commencé, j'ai compris l'écart qu'il y a entre la théorie et la pratique ! On a commencé par un petit huit brésilien, où j'ai subitement pesé plusieurs fois mon poids. J'ai essayé de lever les bras mais c'était dur, car ils pesaient quatre fois plus que d'habitude ! J'avais la sensation que mes joues tombaient, comme si une main invisible tirait dessus. J'ai eu l'impression pendant la figure d'être un morceau de cire qui fond. Etrange sensation ! A peine sorti du huit, le pilote m'a demandé si j'étais toujours là avant d'y aller franco. Difficile de décrire à quel point ce « franco » peut être violent. Les figures se sont enchaînées à toute vitesse, sans discontinuer : tonneaux, looping, tonneaux, vol dos. Ca n'arrêtait plus. A peine avions-nous achevé une figure qu'une autre suivait.. Pendant les quelques fractions de secondes de relâche entre chaque manœuvre, je tentais de retrouver mes points de repère, mais le ciel et la terre ne semblaient pas décidés à rester à la même place plus d'une seconde. J'ai finalement abandonné l'idée de m'accrocher à un repère, c'était tout simplement impossible : mon oreille interne avait lâché l'affaire. Le pilote me demandait régulièrement si j'étais toujours avec lui, et je répondais avec le sourire. Car malgré l'intensité des évolutions qui allait crescendo, malgré la perte de repères et l'impression d'être dans un cocon qui tourne en tous sens, et malgré la fatigue de plus en plus intense que je ressentais, je me sentais bien ; je profitais pleinement de ces sensations insolites et de cette perte totale de contrôle. C'était comme une renaissance, et l'homme qui est ressortie de cet appareil peut bien ressembler à celui qui y est entré : je sais bien qu'il s'agit là de deux hommes différents. Davantage d'information sur cette expérience de vol en Fouga Magister en cliquant sur le site de l'organisateur.